Ives - Psalm 67 « God be merciful unto us »

Charles Ives

Psalm 67 « God be merciful unto us »

pour chœur mixte à huit voix a cappella

« L’idée de simultanéité d’expressions intrigua Ives toute sa vie. Il ne se remit jamais de l’excitation d’avoir entendu, enfant, trois fanfares de village jouer en même temps à différents coins de rue. Ives réussit partiellement à reproduire cette simultanéité d’effet et un critique qualifia plus tard cette solution de “perspective musicale”.»
Aaron Copland

La partie la plus passionnante de l’œuvre chorale de l’Américain Charles Ives est sans doute sa musique sacrée, en particulier la série des Psaumes. Toute cette production date de la jeunesse du compositeur. La pièce préservée la plus ancienne date de 1888 ; il a alors 14 ans !
Si la musique chorale s’avère généralement l’un des domaines de composition les plus soumis à la tradition, il est stupéfiant de constater que les Psaumes d’Ives sont écrits dans sa veine la plus avant-gardiste. Il utilise le chœur comme champ de recherches expérimentales à une époque où sa musique instrumentale demeure beaucoup plus liée à la tradition. On serait tenté d’expliquer cet état de fait par l’activité d’Ives comme organiste et chef de chœur d’église, tout d’abord dans sa petite ville natale de Danbury (Connecticut) puis à l’université de Yale où il poursuit ses études et enfin à l’église presbytérienne de New York. Lorsqu’il abandonne ce dernier poste en 1902, pour se lancer avec succès dans son travail de courtier dans sa propre compagnie d’assurances, sa production religieuse s’arrête.
Il demeure peut probable qu’il ait pu faire chanter les plus difficiles de ses Psaumes par des chœurs paroissiaux, alors qu’aujourd’hui encore ils restent presque insurmontables aux ensembles professionnels les plus aguerris.
Il semble cependant que le Psaume 67, relativement le plus aisé d’éxécution, ait été chanté au moins une fois en 1937 ; il fut d’ailleurs le premier à être publié et enregistré. Il superpose en contrepoint d’accords les tonalités de do majeur (voix de femmes) et de sol mineur (voix d’hommes), le résultat évoquant, selon le compositeur, « une sorte de plain-chant élargi » et rappelant quelque faux-bourdon médiéval. Il n’est pas impossible que ces sonorités bitonales aient été suggérées au jeune compositeur-organiste par le jeu des mixtures. Quoi qu’il en soit, Ives soulignait bien qu’il ne fallait pas interpréter cette superposition de do majeur et de sol mineur comme un renversement de neuvième de dominante de fa, mais bien comme deux tonalités distinctes. La section centrale de cette pièce de forme ternaire fait contraste : c’est un fugato dont le rythme sautillant symbolise la jubilation des peuples.

Notes d’après

  • Harry Halbreich, « Charles Ives », in Guide de la musique sacrée et chorale profane, Fayard, 1993
  • Jean-Noël von der Weid, « Etats-Unis », in La Musique du xxe siècle, Hachette, 2005
Date de composition: 
1894-1899
Création: 

Création le 6 mai 1937, États-Unis, New York, W.P.A. Theatre of Music, par The Madrigal Singers sous la direction de Lehman Engel

Nomenclature: 
chœur (SSAATTBB)
Durée: 
2’45